J’ai assisté ce lundi à un débat sur le mariage pour tous.
Cette réunion avait été semble-t-il organisée à la demande de certaines instances religieuses. Organisée par Olivier Faure, député de la 11ème circonscription de Seine et Marne, en la ville de Savigny le temple, il y avait donc un public à majorité « religieux » et plutôt adulte pour ne pas dire carrément très âgé.
C’est bien dommage, et d’ailleurs Clémence, une habitante de 20 ans, dans son intervention a regretté l’absence de jeunes, car c’est au fond eux qui représentent et sont l’avenir de notre pays et de notre société.
Il y a eu des échanges relativement vifs mais dans l’ensemble, chacun a respecté les opinions des autres, même si parfois on se coupait la parole ou on s’invectivait.
Sur le fond, le débat n’était pas centré uniquement sur le mariage pour tous. En effet, la grande crainte de la plupart des présents portait sur l’adoption, plus tard, par ces couples homoparentaux.
Il y a donc eu de nombreuses interventions sur le droit de l’enfant (droit à connaître sa filiation exacte, entre autres, on a beaucoup abordé le sujet de l’adoption) mais aussi le droit à l’enfant, qui est le droit de parents à avoir un enfant. Comme l’a souligné une partie du public, une maman seule ne demande pas l’autorisation pour procréer, des couples hétérosexuels non plus. Pourquoi donc les couples homoparentaux devraient demander à avoir le droit ? Parce que leurs couples ne représentent pas la nature des choses, la vie, est la réponse apportée par la plupart des « contre », en règle général des religieux.
« Soyons réalistes, les enfants ne naissent pas dans le choux » Cette phrase prononcée vaut donc réalité. Les enfants qui vivent déjà au sein d’une famille homoparentale savent bien qu’ils ne sont pas nés de deux mamans ou de deux papas.
On parle alors de la psychologie de l’enfant dans une telle famille, la difficulté pour eux de se construire, d’être acceptés et de s’accepter. Mais n’en est-il pas de même pour une grande partie d’enfants adoptés, y compris dans des familles dites « normales » (car oui, le terme a bien été employé, ce qui renvoie comme le souligne notre député à « l’anormalité »). Et que dire d’enfants qui vivent avec uniquement leur mère ou plus rarement leur père ? Allons plus loin comme certains dans l’assistance, même si ce n’a été dit que du bout des lèvres : qu’en est-il des enfants dont les parents se disputent régulièrement, dont le mari bat sa femme, voire les enfants eux-mêmes ?
A la question posée par un intervenant à Olivier Faure « Si demain vous et votre épouse veniez à mourir, à qui confiriez-vous vos enfants ?« , j’ai répondu intérieurement, pour moi-même : si je devais mourir ainsi que mon mari, je confierai mes enfants à une famille qui ne les battront pas, qui les aimeront et les éduqueront suivant des principes équivalents aux miens. Bien plus tard, Olivier Faure a répondu à peu près la même chose. En résumé, il confierait ses enfants à quelqu’un en qui il a pleinement confiance.
Ces questions restent en suspens tandis que d’autres émergent. L’honorable Faure (private joke) nous parle d’amour. Celui que peut éprouver tout être humain envers un autre humain, de même sexe ou non. A ce moment, l’un des prêtres d’une paroisse de la ville dit haut et fort « On parle de code civil, là, pas d’amour ! ». Interloqué, légèrement souriant quoique dénué d’ironie, Olivier lui répond, calmement : « je suis étonné que vous, un homme d’église, puissiez parler de mariage en écartant l’amour… ».
Lorsqu’on s’étonne que Dieu, qui est censé accueillir tout le monde, qui prône le « aimez-vous les uns les autres » et le respect, l’acceptation des différences, une voix a tonné, en réponse : « Dieu ne hait pas les homosexuels, il hait l’homosexualité ! ». Légère nuance, en effet. Mais haîr l’homosexualité est-il moins grave ?
Il y a, sous-jacente, une peur de l’homosexualité, ou un déni, ou encore, osons le dire (j’ose le dire car je l’ai ressenti à certains moments) une haine de l’homosexualité.
Beaucoup rebondissent là-dessus, et l’on approuve à peu près tous Clémence qui dit que l’on ne devient pas homosexuel. L’homosexualité n’est pas un devenir mais un être. Cela en réponse à une peur de certains qui peut-être pensent que la promulgation de la loi sur le mariage pour tous va faire « naître » de nombreux homosexuels, que le fait d’accepter qu’ils se marient va éteindre l’humanité !
Toutes les religions étaient peu ou prou représentées. Il y avait des prêtres, des pasteurs, au moins un représentant de la religion musulmane, une catholique reconvertie en bouddhiste, et sûrement des représentants du judaïsme même si je suis arrivée en retard donc je ne pourrais le jurer.
La plupart de ces religions bannissent l’homosexualité et sont donc contre le mariage pour tous. Pourtant, dans l’assistance, des croyants se disaient favorables à cette loi. Il en est de même des partis politiques. Il y en avait du Parti Socialiste ou de droite, mais tant dans un camp que dans l’autre les avis étaient partagés, comme l’a habilement fait remarquer un maire d’une commune voisine, nous lisant des commentaires de Jospin.
Il a donc été question d’enfant, d’amour, de religion et d’acceptation, mais aussi de sémantique. Beaucoup ont peur du devenir des mots père et mère, beaucoup se posent la question de savoir ce qu’il y aura écrit sur le livret de famille.
Parent 1 et Parent 2 n’existent ni l’un ni l’autre dans le projet de loi, comme l’a rappelé notre député. Le langage, les mots employés, ont forcément leur importance. Et si les fondements de la famille ne s’effondrent pas pour un oui entre deux êtres du même sexe, il sera important d’employer les bons mots et de bien dire les choses.
Le débat a été long et animé.
Je suis venue avec mon avis, mais dans un esprit d’écoute de l’autre, pour tenter de comprendre certains arguments, qui finalement sont toujours les mêmes, à mon sens, c’est-à-dire refuser ce qu’on ne peut comprendre, refuser la différence.
Mon histoire, mes amis font que je suis personnellement pour. Et je suis repartie de cette réunion du même avis qu’en y arrivant.
J’en retiens une forte incompréhension les uns des autres ainsi qu’une peur ou une haine de l’homosexualité chez certains.
J’en retiens aussi un beau moment d’écoute et de partage d’autres, qui ont su respecter les avis divergeants.
J’en retiens également que notre député, qui devra voter ce projet de loi, est reparti certainement enrichi des interventions des uns et des autres, et qu’il votera, comme il l’a dit, en tant que représentant de la République laïque.
J’en retiens enfin la phrase d’Olivier Faure : « Ajouter des droits aux uns n’en enlève pas aux autres.«
Ceux qui veulent signer la pétition en ligne pour le mariage pour tous peuvent le faire ici :
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