Je viens aujourd’hui te parler d’un sujet important. Un sujet qui nous touche tous et toutes. Un sujet qui est en plein cœur de l’actualité, et que, pourtant, nous avons tendance à mettre à distance. Moi la première.
Lorsque j’entends un fait divers au journal télévisé mentionnant un viol, j’en ai des frissons, et je secoue vivement la tête pour m’ôter de l’esprit l’image qui m’assaille. En tant que femme, je me projette dans la situation, et je la trouve tellement insoutenable que je préfère l’effacer, passer rapidement à autre chose.
Sauf que voilà, des viols, il y en a plus qu’on pourrait le penser. Deux cents par jour. Un toutes les sept minutes. Alors forcément, qu’on le sache ou pas, des femmes qui ont subi cette barbarie, il y en a forcément autour de nous. La plupart n’en parlent pas. Toutes sont détruites.
J’ai la chance de ne pas faire partie de ces femmes. Je ne peux pas comprendre ce qu’elles ont enduré, ce par quoi elles passent pour se reconstruire. Mais ce n’est pas une raison pour me taire et passer mon chemin. Au contraire. Parce que ça pourrait être moi, ou pire, ma sœur, mon amie, ma fille… Parce que ce sont des femmes, comme moi. Et que je peux saisir à quel point un acte d’une telle brutalité, touchant à l’intimité, peut faire basculer une vie.
Alors aujourd’hui je veux soutenir le mouvement de soutien qui arrive en avant scène. Ce mouvement de manifestation, autour de ce sujet si sensible, si délicat, si intime. Après avoir visionné le documentaire de France 5 : Viol, double peine, je réalise à quel point l’acte en lui-même n’est souvent que le début d’un parcours du combattant. Je n’imaginais pas qu’il fallait justifier d’avoir été violée, donner non seulement des preuves, mais aussi assurer les policiers que non, on ne l’avait pas cherché. Je n’avais pas conscience du nombre d’années qu’il fallait avant que justice soit faite, lorsqu’elle l’était. Les chiffres sont affligeants, ils font froid dans le dos. La façon dont la justice appuie sur la tête de ces femmes qui sont en train de se débattre pour ne pas couler est juste intolérable. Dans ces conditions, comment s’étonner du silence que gardent la plupart des victimes ?
La honte et la culpabilité les rongent. Toutes sont en miettes après avoir vécu l’horreur. Elles ont besoin de soutien, de compassion, d’écoute. Celles qui osent en parler à leur entourage se voient souvent répondre « Je comprendrais si tu ne voulais pas en parler ». Mais ne nous leurrons pas. Si le sujet est abordé, c’est qu’elles sont prêtes à le faire. Parce que, bien souvent, leur intimité n’en est déjà plus une. Par contre, nous, sommes-nous prêts à écouter, à imaginer, à accompagner ?
Pour que chacune puisse retrouver sa dignité et reprendre le cours de sa vie, il me semble important que nous gardions les yeux et les oreilles ouvertes. Notre rôle, aussi petit soit-il, peut faire la différence. Osons engager la discussion avec nos semblables, osons les regarder en face et les aider à se regarder dans la glace, à avancer la tête haute. Parce qu’elles n’ont rien fait pour mériter ce qui leur est arrivé, ni pour endurer notre mépris ou notre indifférence. Pour en finir avec le tabou.
Pour en savoir plus sur le sujet :
Documentaire pour France 2, Infrarouge : Viol, elles se manifestent
Documentaire pour France 5 : Viol, la double peine
Le Nouvel Obs du 21 novembre 2012 :Le manifeste des 313 : « Je déclare avoir été violée »
Pour signer le manifeste : violmanifeste@nouvelobs.com
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