[Je vous préviens tout de suite, malgré le titre racoleur, il n’y aura pas de politique ici, d’ailleurs, aucun commentaire prenant parti d’un côté ou de l’autre ne sera publié, ce n’est pas le sujet]…
Je vais tâcher de vous expliquer pourquoi il ne faut jamais, jamais, jamais – mais à aucun prix ! – parler politique avec des amis d’autres bords.
J’ai rencontré ce type il y a plus de deux ans. Un beau brun avec des traits vaguement hispaniques, des yeux noirs et un sourire à faire fondre un radiateur. Beau, je vous dis. Trop beau pour être hétéro ? Eh oui ! Pas le temps d’avoir des vues sur lui, j’apprends que ce garçon aime les garçons, mais ça ne pose pas de problème parce qu’entre temps, le courant est bien passé. J’ai donc le beurre et une partie de l’argent du beurre : j’ai un ami passionnant, de bon conseil, qui, cerise sur le gâteau, est agréable à l’œil. Et puis, ce mec, c’est tout sauf une « folle ». Comme je vous le disais : il est beau, il le sait et il prend soin de lui, mais par chance, il n’est pas maniéré pour un sou. Il n’a pas besoin de se donner un genre, il est juste lui, simplement lui.
On partage des soirées cinéma d’auteur, des weekends au vert entre potes, on essaye de se voir une fois tous les deux mois pour échanger les potins et on adore ça. Ce garçon m’impressionne par la clarté de son esprit, il est très brillant – il est dans une des meilleures écoles de France et pour son mémoire de fin d’études, il a rédigé 350 pages (!) en dix jours. Et vous savez quoi ? Ca ne l’empêche pas de rester humble. Il me fait penser à la phrase : « l’humilité est l’élégance de l’intelligence ». Ce type a la classe.
Du moins, c’est ce que je croyais.
A moins d’avoir passé les derniers mois dans une tribu nomade au fin fond de l’Amazonie, vous n’avez pas pu rater le débat de société dont il est question en France en ce moment. Les journaux nous en rabattent les oreilles, les gens descendent dans la rue et sur Facebook, ça se tape dessus dans une escalade d’intolérance mutuelle saisissante. C’est d’ailleurs sur Facebook il y a moins de vingt-quatre heures que je remarque le statut très engagé de cet ami. J’avais discuté avec lui auparavant du sujet de manière très sereine, et il m’avait tenu un discours plutôt modéré.
Je suis d’abord étonnée par ce changement subit et surtout par l’acidité inhabituelle de son propos (lui d’ordinaire plutôt ouvert au débat). Plus que certainement mal inspirée, je décide de rédiger un email privé mettant en cause ses allégations fielleuses ponctué de quelques phrases taquines et d’autres plus provoc.
Quelle n’a pas été mon erreur.
Ce matin, en ouvrant ma boîte mail, je me suis pris une claque. Au départ, je ne l’ai pas reconnu. J’ai cru que quelqu’un d’autre avait envoyé un message par erreur, mais non, ce genre de chose n’arrive pas. C’était une bonne claque qui m’était destinée, une que tu ne vois pas venir, qui éclate d’un coup sec et te laisse rouge et pantoise.
« Ma pauvre fille, je n’ai pas l’intention cette fois de répondre longuement à ton long mail, que d’ailleurs je ne t’ai pas demandé de m’écrire : j’en ai assez, plus qu’assez que tu te sentes obligée de me vomir aux oreilles ton radotage haineux et stupide, enrobé d’une fausse douceur qui ne te ressemble guère. […] Tu es choquante et tu n’as aucune lucidité ; tes propos sont aberrants et agressifs, sans même que tu consentes à en prendre conscience. Je ne compte pas échanger davantage, ni perdre mon temps, avec une imbécile de ton acabit.
Comprends bien cependant que ce ne sont pas les idées politiques qui nous éloignent : c’est ton absence de valeur sur le plan humain, que je constate avec tristesse jour après jour.
Maintenant tu voudras bien faire ton chemin sans moi et ne plus me contacter. »
C’était sa réponse. Lapidaire, limite insultante. Finalement, là où j’avais raison au départ, c’est que c’était la réponse de quelqu’un que je ne connaissais pas. Je n’avais jamais imaginé que ce garçon au sourire d’ange, à l’esprit vif et dont le rire sonore résonne encore autour des bassins du Luxembourg puisse se muer en une personne aussi cruellement amère. Au fond, ça ne me dérange pas qu’il ne soit pas aussi classe que je le croyais,cela ne le rend que plus humain.
Simplement, j’aurais dû me douter avant même d’écrire. J’aurais dû me souvenir des avertissements de notre amie commune qui m’avait expliqué que sa recherche de stage le rendait hargneux. J’aurais dû sentir que son état d’esprit avait changé et que le sujet était devenu trop brûlant. J’aurais dû chercher à comprendre ce qu’il vit en ce moment. J’aurais dû me douter que lors de notre précédent débat, sa sérénité pouvait être feinte. J’aurais dû voir que son changement de discours n’était pas accidentel. J’aurais dû prévoir qu’il s’enflammerait sur le sujet comme jadis il s’était enflammé pour d’autres causes.
D’accord, j’ai merdé en premier, mon message était très maladroit. D’ailleurs, quelque part, je n’ai certainement que ce que je mérite.
« On peut rire de tout, mais pas avec n’importe qui ».
Cette leçon m’aura appris que l’on peut débattre de tout, mais pas avec n’importe qui. Dommage que cela m’ait coûté si cher. Si cela peut vous éviter des erreurs ou vous rappeler à la prudence, alors ma journée ne sera pas complètement perdue.
Aujourd’hui, la politique a tué un ami.
Et vous, vous vous êtes déjà brouillé avec des proches pour des questions de politiques ? Vous arrivez à discuter avec des amis de l’autre bord dans le respect ?
Article rédigé par Emmzie
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