Voilà un certain temps déjà que je veux écrire ce billet, mais je n’arrivais pas à trouver les bons mots. Les mots justes, ceux qui feraient comprendre ce que je vis, sans en rajouter et tomber dans le pathos.
Il paraît que ce n’est pas une maladie, puisque ce n’est pas un dysfonctionnement de l’organisme. Il paraît que cela touche bien plus de femmes qu’on ne le pense, mais on ne peut pas le savoir vraiment car beaucoup n’en parlent pas. Par ignorance, ou par déni. Par pudeur, ou par honte. Par peur des réactions. Va-t-on se moquer de moi ? Va-t-on me rejeter, ou pire encore, avoir pitié ?
Je suis sûre que dans d’autres temps, les femmes comme moi ont dû être exposées, dans des foires ou des cabinets de curiosité. Entre la femme à barbe et l’homme éléphant. Des freaks, que les gens venaient regarder d’un air à la fois dégoûté et envieux, enthousiasmés de voir enfin « la chose » mais sidérés par son apparente normalité.
Je ne sais pas exactement quand cela a commencé, mais c’est certainement lorsque je suis devenue maman. Les hormones de la grossesse, peut-être, qui ont entraîné une modification du fonctionnement de mon organisme. A moins que cela ne soit arrivé plus tard, alors que les enfants étaient déjà là. Je ne saurais vous dire précisément.
Ce dont je me souviens très bien, par contre, c’est de la première fois que j’en ai pris conscience. Que j’ai réalisé qu’il se passait quelque chose de différent, que je ne réagissais plus comme avant. J’étais avec mon Amoureux, heureusement, il me connaît bien. Lui n’a rien dit alors, et j’ai fait comme si de rien n’était. Nous n’en avons pas parlé, je me suis dit que je l’avais imaginé, peut-être.
Mais cela s’est reproduit quelques jours plus tard, et cette fois là a été tellement spectaculaire que mon Amoureux n’a pas pu ne pas me faire la réflexion. J’étais terriblement gênée, vous pensez bien. C’est une chose assez inconfortable, il faut bien le dire. C’est soudain, surprenant, terriblement puissant.
Alors nous en avons parlé, longuement. Je lui ai expliqué que je ne comprenais pas ce phénomène, que je ne savais pas d’où cela pouvait venir, mais lui en avait déjà conclu que cela était dû à mon nouveau statut de maman. Il m’a avoué m’avoir trouvée changée depuis la naissance de nos enfants, une sensibilité différente et plus exacerbée. Il m’a dit que cela ne le dérangeait pas, qu’il espérait juste que cela ne serait pas trop abondant à chaque fois. Il m’a assuré qu’il trouvait ça plutôt mignon, et rassurant (allez savoir pourquoi).
Les fois d’après, j’ai essayé de prendre les choses en main et de contrôler de ce qui allait se passer. Quand je commençais à ressentir les signes précurseurs, j’essayais de penser à autre chose, ou de me retenir. Je me disais « ah non non non, pas maintenant, stop ! », histoire d’arrêter le flux. Mais je n’ai jamais réussi.
Cela se produit systématiquement désormais, mais j’en ai pris mon parti. J’ai admis que je ne suis pas anormale, et j’avoue que le fait que mon Amoureux n’ait pas honte de moi m’aide beaucoup à le supporter.
Je dois le reconnaître, et c’est la raison pour laquelle je vous l’écris aujourd’hui. Pour le clamer haut et fort, et dire que cela n’est pas tabou.
JE SUIS UNE FEMME FONTAINE.
C’est plus fort que moi.
Dès que je vois un petit bout de chou tout mignon à croquer, je fonds en larmes. Dès que je regarde un film qui parle de bébés, je fonds en larmes. Dès que j’entends parler de maltraitance, ou d’enfants malades, c’est encore pire. Les histoires d’amour, les vieux trucs à l’eau de rose, tout ce qui est guimauve et bisounours, toutes ces sources à sentiments sont un calvaire pour moi, un très haut risque de grandes eaux !
Mais je l’assume, hein, parce que je sais que vous êtes très nombreuses, vous aussi, à vous écrouler en sanglots devant la Belle et le Clochard ou Quand Harry rencontre Sally.
Finalement, nous sommes peut-être toutes des femmes fontaines !
Hey, what did you expect ?
Source image : www.data.whicdn.com
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