A une époque où la moitié des repas entre amis se terminent par l’évocation douloureuse du prix de loyer ou du mètre carré, je vais vous raconter le jour où j’ai testé pour vous… l’achat d’un appartement à 9 millions d’euros.
Là, vous vous frottez les yeux. Vous vous en voulez de ne pas vous être rendus compte que oui, grâce à mon super blog BD et ses produits dérivés (le T-shirt Kaka Proute, le film d’animation et le jeu vidéo), j’avais amassé une fortune.
Je vous rassure tout de suite : l’appart’, ce n’est pas moi qui l’achetait. Et ce n’était pas moi qui le vendais. J’étais juste en visite chez les très très riches, pour des raisons purement professionnelles.
Je venais de terminer mes études et j’ai reçu un coup de fil pour mon premier contrat : la vente d’un appartement, dans une étude notariale située Rue de la Paix à Paris.
Le lendemain, jour de la signature de l’acte de vente, j’arrive en avance à l’étude. Je m’assois dans un fauteuil doré recouvert de velours rouge, au milieu des dorures de la salle d’attente. Je feuillette Yachting magazine, des fois que l’envie me prenne d’acheter un voilier. Je me tortille un peu pour vérifier discrètement que je n’ai pas oublié d’enlever une étiquette sur mon tailleur (acheté la veille chez Camaïeu).
Dix minutes après, arrivée d’un homme en costard/cravate. On attend en silence. Un peu plus tard, arrivée d’un homme en jeans noir, chemise ouverte, la quarantaine, très bavard. Il s’adresse à moi : « Vous avez réussi à vous garer facilement ? C’est l’enfer, j’ai tourné vingt minutes, je suis garé n’importe comment, j’espère que ça ne va pas prendre trop longtemps ». Moi : « Euh… je suis venue en métro ».
Ensuite, arrivée d’une femme d’une quarantaine d’année également, jeans et chemisier (probablement pas de chez Camaïeu), et accompagnée d’un autre type en costard/cravate.
A ce moment-là, le notaire débarque et nous fait entrer dans son bureau avec force poignées de main. On fait un tour de table, ce qui me permet d’identifier les protagonistes.
La femme est autrichienne, c’est elle qui va acheter l’appartement. L’homme est algérien, c’est le vendeur. Les types en costard sont des sous-fifres qui sont là pour conseiller leurs clients. Je tire une première leçon de mon incursion chez les très très riches : quand on est plein aux as, on n’a plus besoin de mettre de costard.
La lecture de l’acte commence. Je l’avais reçu la veille, mais en version « confidentielle », sans les noms, les adresses, ni les montants. Là, j’ai sous les yeux la version « adulte » non censurée. Je feuillette. Sans surprise, tout le monde est domicilié dans un paradis fiscal (Iles Anglo- Normandes, Lichtenstein…). Et là je vois le montant de la bicoque : 9 millions d’Euros. Gloups.
Visiblement, les très très riches, ça ne leur fait pas le même effet qu’à moi. On continue la lecture de l’acte, on pinaille sur quelques trucs ici et là, notamment la présence de serrures sur toutes les portes, y compris la cuisine (visiblement, c’est un point essentiel).
Au fil des questions, je me rends compte que l’acheteuse n’a pas visité les lieux ! Elle achète un appart à 9 millions d’euros sans l’avoir vu. D’un autre côté, moi aussi, ça m’arrive, quand il y a trop de queue chez H&M, j’achète une robe sans l’essayer. C’est vrai quoi, il ne faut pas hésiter à se simplifier la vie.
Le vendeur est du genre tchatcheur, il a beau ne pas parler la même langue que l’acheteuse, ça ne l’empêche pas de faire l’animation.
Lorsque le notaire commence à lire le descriptif de la cuisine, le vendeur demande à l’acheteuse si elle veut acheter les meubles et l’électroménager. « Elle est très bien, toute neuve, elle vaut 130 000 EUR, je vous la fait à 80 000, c’est une affaire». Hésitation de l’acheteuse. « Quelle couleur ? ». « Blanche ». Bref conciliabule avec son conseiller. OK, elle prend la cuisine à 80 000 euros. C’est dommage, si elle n’en avait pas voulue, je l’aurais bien prise pour mettre dans mon studio.
A la fin de la lecture, tout le monde signe les pages, se lève, se félicite, se serre la main, échange trois blagues, et repart chercher sa Maserati avant d’avoir un PV. Le tout a pris environ une heure.
Deuxième et dernière leçon de mon incursion chez les très très riches : dépenser 9 millions d’euros, ça ne prend pas très longtemps. Faudra que je m’en souvienne le jour où je les aurais… dans une autre vie !
Article rédigé par Les grandes aventures du petit Kaka Proute.
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