Je suis socialement complexée (ou pas) BEAUTÉ

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Qu’on se le dise, à l’heure où tu étais encore une adolescente mal dans ta peau à la recherche de ton identité, tu passais ta life à te comparer aux autres. Aux autres filles surtout. Tu pouvais envier des nanas sous prétexte qu’elles avaient les cheveux raides parce que les tiens étaient bouclés et que tu détestais ça, sous prétexte que d’autres avaient un corps de rêve, alors qu’il t’était insupportable de te avoir à walp’, que certaines avaient des amoureux, et que toi, t’en avais jamais eu, et pour ce qui étaient de celles qui décrochaient des bêtes de notes en cours sans avoir révisé, là, tu capitulais ; le pire, c’était les nanas qui avaient tout, des cheveux raides, un corps de rêve, un mec, et de bonnes notes en classe, ce, sans le moindre effort, de manière naturelle quoi. Pour toi, ces nanas excellaient, alors que toi, tu galérais pour avoir tout ça. Qu’on se le dise, tu avais bel et bien des turpitudes d’adolescente à cette époque.


 


Qu’on se le dise aussi, à l’heure où tu écris cet article, tu peux annoncer haut et fort que tu as dépassé ce stade depuis belle lurette. Depuis quand exactement, tu ne sais pas, mais sans doute depuis que t’es mieux dans tes pompes, bref, que tu t’assumes. T’as toujours pas les cheveux raides, mais t’as appris à aimer tes boucles, voire à les dompter quand bon te semble, t’as toujours pas un corps de rêve, mais apparemment, tu restes potable, t’as toujours pas d’amoureux stable mais tu te forges ta propre expérience sur les hommes avant de te caser pour de bon.


 


Bref, quand tu croises une de ces meufs qui excellaient à l’époque dans la rue, même pas tu fais gaffe. Mais, qu’on se le dise, avec tes nouvelles turpitudes de pseudo-adulte, il y a des moments où et là, t’admets, tu te sens comme un cheveu sur la soupe, complètement décalée, différente, limite pas normale, bref, le même état d’esprit qu’à l’époque des boutons et du chemin de fer sur les ratiches. En réalité, tu t’es jamais sentie vraiment « normale », il y a toujours eu un décalage entre ton vécu et celui des gens qui t’entouraient. Pour exemple, à l’heure où une nana de ta classe de BTS s’était vue tomber en cloque, toi, t’avais jamais embrassé de mec, c’est dire.


 


Aujourd’hui, tu ne te sens pas normale quand tu zones sur Facebook à la recherche du Que-sont-ils-devenus et que tu constates que la plupart de tes connaissances collégiennes et lycéennes sont maquées, sérieusement maquées même, voire sur le point de se marier et d’enfanter. Le pire, et là, t’avoues, c’est quand tu vois que ces poufiasses qui excellaient il y a dix ans, sont les mêmes qui ont déjà homme, enfant, maison, labrador et monospace bref, une situation. Là encore, elles ont des choses dont tu rêves mais que tu ne possèdes pas, là encore, elles gagnent. Tu ne te sens pas dans la norme, et quand bien même être dans la norme, là encore, t’as dépassé ce stade. Ce qui te fait le plus chier et peur, c’est que rencontrer un homme fait pour toi et engendrer des mini-Fulmi’, ben t’en as très envie. Donc t’es obligée d’admettre que pour l’heure, ta nature va à l’encontre de la marginalité. C’est pas que t’as envie d’être et de faire comme tout le monde, c’est juste que l’homme, l’enfant, la maison, le labrador et le monospace, ben t’en as très envie. T’en as envie depuis très longtemps, et tu pousserais même en disant que tu as eu cette envie bien avant ces poufiasses-gagnantes.


 


Quand tu étais petite, tu voulais avoir ton premier enfant à 25 ans, pas trop tard. Aujourd’hui, t’es à l’aube de tes 26 berges, et t’as même pas trouvé le bon mec. On peut pas dire non plus que les éventualités prolifèrent, peanuts. Du coup, t’as l’impression que ça ne sera jamais ton tour, que jamais tu n’auras le droit à ce bonheur ; et comme tu le dis si souvent, « si je ne fonde pas de famille, j’aurai raté ma vie ».  Et c’est dans ces circonstances que fatalement, quand tu regardes autour de toi et que tu constates que ça se marie, que ça pond à gauche à droite, ben ça te ramène à ta propre situation : t’en es pas là, t’en es loin, bref, t’es pas sortie de la berge.  Et comme si cela ne suffisait pas, aujourd’hui, quand The Potentiel ONE t’annonce qu’ils essaient de faire un bébé avec sa belle, là encore, tu te sens à part, à l’ouest, pourquoi pas toi.
 




 


Alors fonder une famille est une chose, le pouvoir en est une autre. Toi, tu peux pas sous prétexte que t’as pas rencontré le bon. Mais, même si c’était le cas, il n’est pas sûr qu’en l’état actuel des choses, tu pourrais te le permettre. Fonder une famille, avoir une situation financière, ça, vaste sujet. Quand tu vois qu’à presque 26 ans, tu vis encore comme une étudiante dans un 30 m², que tu dois faire tes comptes quasi tous les jours pour ne pas te voir payer des agios le mois d’après, quand tu vois qu’arrivée au Lidl du coin, tu choisis toujours les articles bas prix, les moins cher quitte à bouffer de la merde, qu’il t’arrive de refuser des sorties sous prétexte que t’as plus un kopeck en poche, te priver sur une chose sous prétexte que tu t’es offert une paire de pompes dont tu avais besoin, ce, deux jours avant, et pour ce qui est de faire plaisir aux proches, petites attentions, et autres petits présents ici et là, ben tu peux pas, quitte à passer pour une malpolie. Ouais, à presque 26 ans, t’en es là, à compter tes sous au moindre centime parce que tu ne gagnes pas beaucoup plus que le SMIC, mais que tu gagnes trop pour avoir des aides.


 


Hormis le fait de fonder une famille, et bien gagner sa vie est une chose, évoluer dans un environnement pro où tout le monde a BAC + 5 en est une autre. Là encore, tu te sens pauvre. Pauvre quand tes collègues parlent de trucs dont tu ignores l’existence, pauvre quand tu les vois faire de grandes présentations sur les produits, ce, en anglais, devant des pontes de l’industrie régional, pauvre quand les entends si bien s’exprimer en réunion ou devant des assemblées de 300 personnes, bref, quand tu les vois si bien assurées dans leur job, t’as plus aucune ambition parce tu sais pertinemment que tu n’arriveras jamais à leur cheville niveau professionnalisme.


 


Et si t’as pas d’ambition, tu pourras jamais évoluer dans un job qui te plaît, donc, stagner niveau salaire, donc, rester dans ton pauvre 30 m². Et paradoxalement, l’idée qu’un homme puisse te sortir de tout ça, sans pour autant vivre à ses crochets ne t’enchante pas non plus. Toi, tu voudrais pouvoir réussir à vivre un peu plus confortablement par toi-même d’abord. Parce que. Qu’on se le dise, et là, attention, once d’optimisme : le jour où ça pétera, ben dans ton 30 m² tu retourneras.


 


Article rédigé par Fulmina


 
 


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