Nous sommes le 21 mars, et c’est le printemps. J’ai pris mon petit déjeuner fenêtre ouverte, le soleil s’étale sur le lit, et, tout comme le jardin, je me sens renaître. Le printemps a cet effet-là sur moi. Nous sommes le 21 mars, c’est le printemps, et je termine aujourd’hui mon huitième mois de grossesse.
Cette phrase, il m’a semblé que je ne la prononcerai pas avant des lustres, tant neuf mois me paraissaient longs. Et nous y voilà, c’est arrivé tellement vite finalement. Dans moins de cinq semaines ma fille sera là, disons dans moins de six semaines si elle décide de prolonger un peu. Je ne réalise toujours pas que nous allons accueillir un bébé, cela me paraît toujours aussi incroyable, incroyablement beau, incroyablement terrifiant, incroyablement magique. Et je suis incroyablement sereine.
Pourtant, ce huitième mois n’a pas été de tout repos ! Ou plutôt, si, il a été celui du repos forcé. Il a débuté au lit, et se termine de même, avec un petit séjour à la maternité entre temps. J’avais eu une petite baisse de moral à la fin de l’année, j’ai eu de nouveau quelques jours difficiles, mais pas à cause de l’immobilisation cette fois. J’ai eu peur, j’ai culpabilisé, j’ai pleuré et écrit pour évacuer tout ça, et je m’en suis sortie rassurée et confiante. Au final, si je regarde bien j’aurais eu seulement deux semaines un peu tristes, autant dire que j’aurais eu une bien belle grossesse.
Un huitième mois au repos, donc, il y a pire. Un peu frustrant parfois, un peu culpabilisant aussi lorsque je vois mon homme épuisé s’occuper de tout en plus de son travail, mais je ne peux vraiment pas me plaindre. J’ai mesuré ma chance, j’ai mesuré mon bonheur, immenses. Ma fille se porte bien, elle ne sera pas arrivée trop tôt, les inquiétudes ne sont plus qu’un souvenir.
Depuis mon retour à la maison, j’ai été suivie à domicile par ma sage-femme, et j’ai eu droit à deux monitorings par semaine. Vendredi dernier j’avais de belles contractions, mais cela ne m’a pas alarmée outre mesure, car je ne sens plus le bébé peser comme avant. Il s’est avéré à l’examen qu’effectivement la tête n’appuie plus sur le col. Je crois vraiment que cette petite fleur va attendre que les beaux jours soient bien installés pour se montrer.
Côté corps, j’ai commencé à vraiment sentir qu’il ne m’appartenait plus totalement, que je le partageais. Cette grande fille prend beaucoup de place, j’ai pris beaucoup de poids, et forcément cela se fait sérieusement sentir. Se lever, prendre une douche, s’habiller, tous ces gestes anodins deviennent de plus en plus compliqués. Oui, je sens vraiment qu’une locataire est installée dans mon ventre ! Ce ne sont que des petits désagréments, mais effectivement la fin se fait sentir. Au cours de ce huitième mois j’ai perdu de la mobilité, c’est clair, et j’ai vu les transformations s’accélérer, mes chevilles enfler de jour en jour, mon ventre grossir encore… C’est à se demander jusqu’où je suis extensible, et ce qui m’attend dans les semaines à venir !
Ce huitième mois aura été surtout consacré à terminer la liste de naissance, faire les derniers achats… On est dans le concret, sans pour autant se rendre compte de ce qu’il va nous arriver. Je ne compte plus les fois où j’ai versé une larme devant une petite chaussette, sa chambre désormais presque rangée, ou même devant un paquet de couches… Le décompte a commencé à se faire en semaines, et plus en mois, et cela a quelque chose d’effrayant. En même temps, l’impatience a vu le jour, et nous avons tous les deux hâte de rencontrer notre princesse, de découvrir enfin à quoi elle ressemble, de la tenir dans nos bras. Oui, finalement, ce qui résume le mieux ce huitième mois c’est ce paradoxe entre peur et excitation, entre inquiétudes et joie, entre inconscience et concrétisation. C’est le mois de la fin, car à compter du moment où l’on entre dans le neuvième mois tout peut arriver, et on n’est jamais sûre de le mener jusqu’au bout. La fin du huitième mois est considérée comme le début du terme, la valise doit être bouclée (en théorie…), le temps qui reste est ridiculement court.
Bizarrement, je garde de ce mois qui s’achève une impression de sérénité, malgré l’hospitalisation, malgré les petits tracas d’ordre physiques, malgré les heures passées à vérifier et refaire des listes de façon quasi compulsive parfois. Peut-être est-ce le soleil d’aujourd’hui qui fausse tout, peut-être est-ce parce que les larmes versées durant quelques jours m’ont lavée, sans doute est-ce grâce à l’écriture et à vos messages de soutien qui m’ont ôté tout poids inutile. J’ai trépigné de ne pas être dans l’action, je savoure aujourd’hui d’être dans l’attente. Parce que ce que j’attends est certain d’arriver, et que c’est un miracle, un vrai.
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