Ce jour où j’ai effleuré la prématurité BEAUTÉ

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Cet article, j’ai commencé à l’écrire avant les quelques jours d’hospitalisation, aussi n’est-il peut-être plus vraiment d’actualité… Néanmoins j’ai eu besoin de le terminer, pour ne plus avoir à y revenir.


 


Il y a un peu plus de deux semaines on a découvert que mon col s’était raccourci, et la seconde sage-femme que j’avais vue ce jour-là m’avait ébranlée en évoquant une éventuelle hospitalisation. Je savais qu’il allait falloir faire attention, mais je n’avais pas envisagé sérieusement que cela pourrait constituer une menace sérieuse. Le lendemain, le gynéco se montrait un peu plus rassurant. Entre ces deux rendez-vous, il s’est écoulé une vingtaine d’heures. Vingt heures durant lesquelles j’ai eu peur. Une peur immense, irraisonnée. Ce sont de ces vingt heures là dont je veux vous parler.


 


J’ai pensé à Sophia, dont la phrase m’avait marquée : « je suis entrée brutalement dans le monde de la prématurité ». C’est ça : le choc, un univers qu’on croit réservé aux autres. Et encore, j’étais plus avancée de quatre semaines dans la grossesse, ce n’est pas rien. Des témoignages, j’en ai lus, et ils m’ont touchée, forcément. On se projette un peu, on imagine l’effet que cela doit faire. Mais le vivre…  Se dire, brutalement, qu’elle pourrait arriver bien trop tôt donne le vertige. Cela semble irréel et en même temps terriblement précis comme menace.


 


Pendant une vingtaine d’heures, je n’ai pensé qu’à ça. Et ma fille, comme pour me rassurer, faisait des cabrioles et déformait mon ventre comme jamais. Oui, ma chérie, tu es en pleine forme et tu es un beau bébé, tu me sembles si grande à l’intérieur de moi, mais tu es toute petite en réalité. Je lui ai expliqué, je lui ai dit que lorsqu’elle nous entendait dire qu’elle était un gros bébé cela ne signifiait pas qu’elle était suffisamment grande pour sortir. Tu es grande pour ton âge, mais encore trop petite pour le dehors. M’a-t-elle comprise ? En tout cas elle s’est manifesté très fort et souvent ce jour-là. Elle a même déplacé sa tête vers le côté, comme pour me dire d’accord, maman, message reçu.


 


À la faveur de la nuit, la panique. Les préoccupations matérielles m’ont envahie, en plus du reste. Rien n’était prêt. Finir la liste de naissance, l’aménagement de la maison, trouver un prénom… On pensait avoir le temps, mais si nous ne l’avions pas ? Si elle arrivait, là, comment faire ? L’Homme m’a rassurée tant bien que mal, il irait acheter ce qu’il faut en catastrophe, ce n’était pas grave. Il a réussi plus ou moins à m’apaiser, à consentir un statu quo jusqu’au lendemain, jusqu’au rendez-vous avec le médecin. Mais la peur revenait par vagues, et je me suis réveillée plusieurs fois pour pleurer cette nuit-là.


 


Je me souviens m’être interrogée sur mon instinct de protection à l’égard de mon bébé après avoir lu quelque part qu’on le développait dès la grossesse. Durant ces vingt heures, j’en ai pris la mesure. Imaginer ma fille naître, si petite, m’a complètement terrorisée. Une peur, une peur profonde et violente, je ne trouve pas d’autre mot pour décrire ce poids dans la poitrine. Et j’ai également compris ce qu’est la culpabilité dont parlent les mamans de bébés arrivés un peu trop tôt. Je la comprenais avant, je la concevais tout du moins, là je l’ai sentie véritablement. Je n’arrivais pas à protéger ma fille suffisamment, et cette pensée m’était insupportable. C’est fou parce que si une amie m’avait raconté ça, je lui aurais clamé tant et plus qu’elle n’y était pour rien. Mais là, c’était de mon bébé qu’il s’agissait, mon enfant qui risquait de souffrir. De toutes les images qui me sont venues cette nuit-là, c’est de loin la pire.


 


Je n’ai pas le droit de me plaindre, et j’ai hésité avant de montrer ces lignes, car je sais que beaucoup sont passé par bien pire. Je n’ai pas accouché, mon bébé n’a rien eu à craindre, et je n’ai finalement fait qu’effleurer la notion de prématurité. Une vingtaine d’heures seulement. Cela ne me donne pas le droit d’en parler comme si je savais vraiment ce que c’est, je n’ai d’ailleurs pas cette prétention. Si j’ai écrit ceci, c’est pour exorciser cette angoisse de courte durée certes mais si intense. Mais c’est également pour dire mon admiration pour ces femmes qui passent par cette épreuve, dont le courage est immense, quoi qu’elles puissent en dire. Vivre cette attente anxieuse ne serait-ce qu’une vingtaine d’heures m’a fait prendre la mesure de ce que peut être la prématurité. Et encore, comment imaginer l’arrivée d’un enfant venu un peu trop tôt ? J’ai juste effleuré la peur, la culpabilité, la panique, les larmes, la prière muette, l’obsession de tenir le coup encore un peu, le plus possible. Je l’ai juste effleuré, et pour celles qui l’ont vécu cela semble bien peu sans doute, mais c’est une expérience déroutante.


 


Cette angoisse s’est dissipée dès le lendemain avec le discours du médecin. Même lorsque j’ai été hospitalisée, elle n’est pas revenue aussi forte. Je savais que le risque n’était pas si grand, je savais que j’avais quasiment atteint le palier des 34 semaines. Je suis chanceuse. Et je savoure encore plus ma grossesse, les mouvements de ma princesse, ces instants précieux où je sais que tout va bien, qu’elle est là, dans le creux de ma main, et qu’elle n’est pas pressée.


 


Article rédigé par Un Carnet Rose.


 
 


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